Jalousie des chefs envers Daniel : v 1 à 10
Belshatsar tué, Darius, le Mède, lui succéda à la tête d’un
nouvel empire. Afin d’en assurer la cohésion et l’unité, Darius désigna 120
gouverneurs (appelés satrapes) chargés de faire appliquer les lois et la
politique du royaume. Les 120 satrapes furent placés sous l’autorité d’un
triumvirat de trois chefs choisis, parmi lesquels se trouvait Daniel, auxquel
ils devaient rendre compte de leur administration. A la recherche d’hommes
compétents, Darius n’avait pas tardé à remarquer la supériorité spirituelle de
Daniel, le juif.
La nomination de Daniel à ce nouveau poste d’autorité ne fit
pas des heureux. Pour les deux autres chefs comme pour tous les satrapes,
Daniel devint l’homme à abattre. Le texte ne nous donne pas la raison de cette
hostilité unanime contre sa personne. Il y a fort à parier qu’elle soit faite à
la fois de mépris pour sa race et de jalousie à l’égard de sa personne. Etre
sous l’autorité d’un Juif, devoir lui rendre compte de son administration
étaient plus que ses gouverneurs païens ne pouvaient supporter. Pour le
renverser de son poste, les ennemis de Daniel n’avaient qu’une seule
possibilité : trouver en lui une faute constituant un motif d’accusation
suffisamment grave pour obliger Darius à le destituer.
Bien que nombreux et motivés, les adversaires de Daniel ne
trouvèrent rien dans la façon dont Daniel assumait ses responsabilités qui
puissent servir leur projet. Daniel était irréprochable. Il ne commettait ni
infraction, ni écart. Il surpassait ses ennemis, non seulement par son
intelligence spirituelle, mais encore par son intégrité. Incapables de le
prendre en faute dans le domaine de sa charge, les ennemis de Daniel n’eurent
plus qu’un recours pour le faire tomber : trouver dans sa vie privée une
faille qui le mette dans l’illégalité quant à la loi du royaume. Comme il n’y
en avait pas, la coalition en créa une. Au nom de tous les chefs, une loi nouvelle
fut proposée au roi ordonnant que quiconque fut trouvé, dans les 30 jours, en
train d’adresser des prières à quelqu’un d’autre que lui, soit jeté dans la
fosse aux lions. Le roi commit ici une double erreur : il ne vérifia pas
si l’unanimité avancée par les promoteurs de la loi était réelle (s’il avait
interrogé Daniel, qu’il estimait, il se serait aperçu de la supercherie et
aurait rapidement discerné les motivations qui en étaient à l’origine), il ne
réfléchit pas au caractère insensé du projet de loi (il ne vit que la flatterie
qu’il représentait pour son égo).
La manière d’agir des ennemis de Daniel nous en dit long sur
la différence de modèle de gouvernance existant entre le royaume de Babylone et
celui des Mèdes et des Perses. Sous Nabuchodonosor, la dictature du régime
était exercée par un homme. Souverain sur tout et tous, le roi décidait selon
son bon plaisir ce à quoi ses administrés devaient se soumettre : Daniel 3,1-2. Sous Darius, c’est par l’entremise de la
loi que la dictature s’impose. Irrévocable, la loi est souveraine sur tous les
sujets du royaume, le roi y compris. Il n’y a rien de nouveau sous le soleil.
Si certains régimes fonctionnent comme celui de Nabuchodonosor, d’autres, sous
l’apparence de la démocratie, le font comme celui de Darius. La suite du récit
le démontre : l’un n’est pas meilleur que l’autre. Les deux peuvent se
montrer aussi répressifs à l’égard des opposants et des récalcitrants à leur
volonté !
Daniel dénoncé au roi : v 11 à
19
Le décret de loi publié, Daniel ne changea rien à ses habitudes.
Trois fois par jour, il se retirait chez lui pour continuer à prier et louer
son Dieu, orienté vers Jérusalem. Bien qu’exilé loin de son pays depuis des
années, Daniel n’avait en rien renié son identité juive. Ses adversaires, qui
le connaissaient, le savaient : Daniel était trop attaché à son Dieu et à
sa foi pour se laisser impressionner par un interdit et infléchir l’exercice
quotidien de sa piété. La régularité à laquelle il s’y adonnait fit que ses
ennemis ne durent pas attendre longtemps pour le surprendre en flagrant délit
de transgression de la loi nouvelle promulguée. Daniel fut dénoncé à Darius.
Suite à cette délation, Darius comprit la motivation qui
était à l’origine du projet de loi des chefs. Derrière lui, le but poursuivi
était unique : non l’unité du royaume ou la gloire du souverain, mais la
destitution de Daniel de la position qu’il occupait et sa mort. Connaissant la
valeur irremplaçable de l’homme, Darius en fut très affecté. Il tergiversa,
chercha toute la nuit une solution pour éviter à Daniel la sanction prévue par
la loi. Mais il ne trouva aucune issue. Ce n’était pas seulement Daniel, mais
lui-même qui était pris au piège du système par lequel s’exerçait le
gouvernement du royaume. Sous peine de discrédit et de trahison à la propre loi
de l’empire, Darius, la mort dans l’âme, dut s’exécuter. Désormais, il le
savait, une seule instance pouvait sortir le prophète du guêpier dans lequel il
se trouvait : le Dieu de Daniel. C’est à Lui que, contre lui-même, Darius
s’en remit, tout en livrant Daniel aux lions !
Délivrance miraculeuse de Daniel : v 20 à 29
On n’est jamais déçu quand, dans l’impasse, on s’en remet
totalement et exclusivement à Dieu. Bien que païen, Darius est, par son
attitude, l’exemple même de la façon avec laquelle un croyant doit se comporter
dans son attente du secours de Dieu. Premier responsable du malheur qui arrive
à Daniel, Darius a d’abord cherché lui-même à corriger son erreur. Pris au
piège, il a manifesté tout le remords et la tristesse pour les préjudices que
sa décision irréfléchie a occasionnés à Daniel. Impuissant pour changer la
situation, il l’a remise à Dieu, priant que la fidélité de son serviteur à Sa
Personne soit récompensée. Enfin, profondément affecté, il a passé la nuit d’attente
qui le séparait du moment où Daniel fut jeté dans la fosse aux lions jusqu’à
celui du constat de ce qui lui est advenu, dans le jeûne, l’insomnie et l’angoisse.
A la lecture du récit, nous ne savons pas dans quels
sentiments Daniel a vécu l’épreuve. Tout l’accent porte sur l’attitude de Darius,
son apprentissage dans la foi et la connaissance du Dieu de Daniel. Connaissant
Daniel, nul doute qu’à l’image de ses amis : Daniel
3,16 à 18, celui-ci était prêt à payer de sa vie son attachement à Dieu.
Mais, comme Il l’a fait pour les deux rois précédents, Dieu voulait par Daniel
se révéler à Darius. Il exaucera donc la prière de dernier recours, telle une
bouteille jetée à la mer, du souverain.
La nuit passée, une seule pensée occupait l’esprit de Darius :
qu’était-il advenu de Daniel ? Plein d’inquiétude, le roi s’approcha de la
fosse, tiraillé entre l’espérance du miracle et la crainte de faire face à l’inéluctable.
S’adressant à Daniel, il voulait avoir la réponse au souhait de la foi qu’il
avait adressé à Dieu pour lui. Le Dieu de Daniel avait-il sauvé son serviteur ?
Etait-il descendu avec lui dans la fosse pour le garder ? L’attente ne
durera pas ! Au lieu du silence, la voix sereine et vivante de Daniel se
fit entendre ! Oui, Dieu, le Dieu de Daniel, avait agi ! Il avait
fermé la gueule aux lions qui n’avaient fait aucun mal à Son serviteur.
Subjugué, le roi ordonna qu’on sorte au plus vite Daniel de là. Au-delà de la
délivrance, l’innocence de Daniel, face aux accusations de rébellion portées
contre lui, était établie. Dieu avait tranché : les mauvais n’étaient dans
l’affaire, ni Daniel, ni Darius, mais les accusateurs jaloux du prophète. Le roi
ne fit pas de quartier. Il appliqua à leur encontre la loi du talion et ordonna
que ceux-ci, avec leurs familles, soient jetés vivants dans la fosse aux lions.
Ils n’eurent pas le temps d’arriver au fond. Les lions s’étaient jetés sur eux
et avaient brisés leurs os en pleine chute.
La fin des ennemis de Daniel ne fit que confirmer le
témoignage rendu à Dieu par la délivrance miraculeuse du prophète. A l’instar
de Nabuchodonosor, après la sortie des amis de Daniel de la fournaise ardente :
Daniel 3,29, Darius ordonna à tous les sujets de
son empire que le plus grand respect soit montré envers le Dieu de Daniel, le
Dieu vivant, éternel qui, seul, peut faire des prodiges.
Alors que se termine ici le récit des aventures de Daniel et
ses amis, une leçon s’impose. Il arrive souvent que, devant la menace de la
persécution, nous prions que les croyants soient épargnés. Le témoignage de
Daniel et ses amis est là pour dire que ce n’est pas en en évitant à Ses
fidèles l’épreuve que Dieu se révèle de la façon la plus magistrale, mais en la
traversant avec eux ! Dieu n’est jamais aussi réel et aussi proche de nous
que dans les situations les plus impossibles. C’est dans les détresses les plus
extrêmes que la vie de la foi est la plus grande. Sans Lui, Jésus nous l’a dit,
nous ne pouvons rien faire : Jean 15,5. Heureux
celui qui en fait l’expérience !
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